Cette bande dessinée raconte l'histoire d'un jeune homme qui par le é a étudié les thermes de Vals (énigmatique bâtiment dessiné par le semble-t-il fameux Zumthor, évoqué ici comme un fantôme) pour son doctorat d'architecte ; son étude trouva son terme sous les coups d'une frénésie, d'une intuition soudaine : foudre d'une compréhension, caresse d'une épiphanie (en mode ostéo cela dit), en une nuit il se sentit percer les mystères de son sujet, en une nuit rédigea sa thèse... puis la brula. Il a gardé le Zippo, c'est sentimental probablement.
Il s'appelle Pierre, la BD s'appelle L'aimant, les thermes sont en Suisse, rien à voir avec le lac Léman, quoique Pierre décide de se remettre dans le bain, à terme ; et il y retourne, à Vals, en Suisse.
Pierre a tant retourné son sujet, encore et encore, tant manipulé le mystère dans les limites de la réflexion rationnelle, qu'il est maintenant possible pour lui, et surtout temps, tentant, voire irrésistible, de revenir au papier à dessin, là où les choses parlent plus vite que les mots, et en disent davantage, d'autant davantage que le mystère de cette intrigue est architecturale.
La compréhension doit trouver une partie de sa résolution dans la sensualité, sous peine sinon, peut-être, d'être un peu vaine. La sensualité, d'un dessin, d'une femme, finit toujours par déer la compréhension, par la sublimer du moins, par lui donner un sens donc, parfois soudain, dans l'allusion d'une utopie, d'une porte dérobée, par apporter quelques dernières pierres à l'édifice insondable, par apporter la perspective...
Les dessins sont fascinants, le grand format aide, et les cases sans bordures, certaines même communiquent en sautant une étape,
les perspectives à angles droits géométriques, labyrinthiques, architecture cubique, dans la montagne sauvage chaotique qui découpe le ciel. Nouvelles perspectives dans le contraste, la perspective est polysémique, comme l'est la profondeur, avant arrière, avant après, traversée en esprit du décor, profondeur du papier plat par l'art graphique, profondeur de l'avenir par l'impulsion. Illusion. Perspectives.
Tout est bleu et rouge, comme dans les vieux magazines en trois dimensions, c'est le bleu et rouge de l'enfance, mais les teintes se lisent sans lunettes spéciales, mettent en perspective les reflets de l'eau, et l'âme... c'est une promesse intenable, mais belle, et bien foutue, d'assaisoner le panorama.