Fighter par TheScreenAddict
Voilà un film qui restera certainement parmi les plus marquants de 2011. Prenant, violent, émouvant, parfois très drôle, souvent puissant, Fighter se présente comme une épopée sportive et familiale directement héritière de Rocky, à travers la justesse de sa peinture sociale et la mise en scène viscérale des combats de boxe. Micky Ward (Mark Wahlberg) est un boxeur prometteur, mais entravé dans son désir d'être champion par une famille de ratés. Son frère, Dicky (Christian Bale), légende de la boxe locale, ravagé par la consommation de crack, se montre de moins en moins à la hauteur quand il s'agit d'entraîner son cadet pour remporter le titre. Après de nombreux déboires familiaux, les deux frères vont tout de même tenter de se déer ensemble pour prouver leur valeur.
Là où Rocky pêchait un peu par la platitude de son interprétation, Fighter réalise un véritable sans faute, un tour de force, transcendé par l'omniprésence électrique d'un Christian Bale déchaîné, dans l'un de ses meilleurs rôles, si ce n'est le meilleur. Mark Wahlberg a beau camper le personnage principal avec une surprenante subtilité et Melissa Leo en faire des tonnes pour s'imposer en mère tyrannique, le comédien gallois règne en maître sur le casting, avec sa carcasse presque aussi amaigrie que dans The Machinist, sa gouaille vampirisante, le naturel désarmant de son jeu. L'expression « rôle de composition » semble à ce titre avoir été inventée pour lui. Véritable moteur émotionnel du film, Bale parvient simultanément à nous dégoûter et à nous bouleverser, créant une icône fraternelle aussi haïssable qu'attachante. Éminemment pathétique lorsqu'il consomme du crack, il se révèle d'autant plus touchant quand il décide de se reprendre en main par amour pour son frère. Avec une aisance et une simplicité de jeu à faire pâlir n'importe quel débutant de l'Actor's Studio. Parce que Bale ne se contente pas de jouer, il incarne totalement son personnage, en profondeur, n'hésitant jamais à sacrifier sa chair et des pans entiers de son âme (parfois de manière terrifiante) pour lui donner vie. C'est à un authentique artiste que l'on a affaire, dans la mesure où l'on finit par l'oublier derrière le rôle, pour ne plus voir que l'humain.
Cette performance rare n'occulte cependant en rien l'écrin scénaristique et visuel du film. Les tensions familiales donnent lieu à des joutes verbales tour à tour savoureuses et douloureuses, virant le temps d'une scène aussi désopilante que violente à la confrontation physique, quand la mère et les sept surs de Micky viennent le forcer à quitter sa nouvelle petite amie (appétissante Amy Adams) pour lui faire regagner leur cocon (ou comment la famille devient un gang dérisoire). Clou du spectacle, les scènes de combat se révèlent d'une étourdissante crédibilité. Le sang, la sueur, les coups, la douleur, la motivation, la fatigue, la rage de vaincre et l'ombre de la mort viennent exploser devant nos rétines et dans nos curs avec la puissance d'un uppercut. Fighter nous entraîne sur le ring comme dans l'intimité de ses combattants avec une sincérité bouleversante. Une sincérité qui émane du duo fraternel, Bale et Wahlberg se complétant magnifiquement. C'est l'amour qui unit les deux frères, plus fort que tout le reste, qui nous fait aimer leur singulière épopée.
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