Pour mener comme il se doit son combat abolitionniste, Hugo prend ici le parti de raconter un fait divers de son époque pour confronter le lecteur aux vrais visages des criminels. Il choisit le cas Claude Gueux, un ouvrier miséreux emprisonné pour vol, qui tua le directeur de sa prison suite au traitement dégradant qu’il subissait.
Ce n’est pas « Le dernier jour d’un condamné » : ici, c’est concret, réel, historique. Le lecteur n’a plus le choix : il faut qu’il se positionne. « Voyez Claude Gueux, nous dit Hugo. Cerveau bien fait, cœur bien fait, sans nul doute. Mais le sort le met dans une société si mal faite, qu’il finit par voler ; la société le met dans une prison si mal faite, qu’il finit par tuer. »
On doit bien évidemment saluer ici les qualités littéraires du livre (bon après c’est Hugo), sa rigueur et sa précision concernant les détails de l’affaire, mais surtout la modernité du propos, qui voit avant tout dans le crime un épiphénomène résultant d’un mal être social. Le propos m’a rappelé le magnifique poème du même auteur « Écrit après la visite d’un bagne » (cf l’extrait à la deuxième slide).
Gros bémol cependant, sur les dernières pages. Hugo milite en faveur d’une éducation religieuse pour le bas peuple, visant à cultiver en eux une « espérance », et ainsi rendre les classes populaires « tranquilles » et « patientes », leur permettant de er en silence leur triste sort… Le grand Karl avait bien raison de parler en de telles circonstances d’ « opium » pour parler des religions appliquées comme un pansement aux injustices sociales !