Alexis de Tocqueville était de famille avec Chateaubriand, par le frère de ce dernier.
Si Chateaubriand, outre ses qualités littéraires, nous montrait brillamment ses talents de prophète politique pour la dans son Livre X de la quatrième partie de ses Mémoires, Tocqueville fait preuve quant à lui d'une sagacité assez exceptionnelle tant il arrive à vulgariser, expliquer et mettre en lumière les évènements politiques de son époque à travers L'Ancien Régime et la Révolution et De la démocratie en Amérique.
Il est toujours utile de comprendre les tenants et aboutissants de faits historiques, et par cet ouvrage, Tocqueville nous explique que la Révolution de 1789 tient bien moins de la rupture que de l'aboutissement de plusieurs décrépitudes observées chez la noblesse française, et surtout d'une évolution fulgurante des mœurs individuelles.
On y comprend que le christianisme n'a pas été combattu en tant que religion, mais en tant qu'institution politique qui imposait trop de contraintes au développement de l'humain, à son accès à la raison, aux sciences. Cependant, là où il est lucide, c'est qu'il souligne le caractère bigot qu'a insufflé la Révolution à ses partisans, qui ne juraient que par la République et devenaient violents avec les opposants, ce qui opère un retour en arrière, du temps de l'Inquisition. Rien que de savoir ça, la sacro-sainte Révolution enseignée au collège en prend un coup.
Les laudateurs de l'Ancien Régime en prennent aussi pour leur grade : Tocqueville ne manque pas de pointer du doigt (le plus objectivement possible) les dérives engendrées par la centralisation du pouvoir, on comprend alors que la monarchie absolue, tant fantasmée par certains, avait aussi ses défauts, notamment les privilèges des fonctionnaires et consorts, immunisés à la justice, ce que je trouve assez inable, mais toujours moins inable que de donner de l'importance à la bourgeoisie dans les affaires communales. On comprend surtout que centraliser un pouvoir à ce point revient à risquer de tout donner à celui qui réussirait à s'en emparer. Comme la fameuse analogie du trousseau de clés qui vous fait perdre toutes vos clés alors que vous n'avez perdu qu'un objet.
Sous Louis XVI, ces dérives s'étaient amoindries, mais c'est paradoxalement ce roi qui finira décapité, victime du poids des siècles et de l'absence de conseillers dignes de ce nom.
C'est un texte limpide, au style concis, et qui éclaire sur beaucoup de sujets à la fois connus et méconnus (tout le monde connait la Révolution et la monarchie du Roi Soleil mais personne n'en connait vraiment les causes et conséquences).
Bref, une analyse brillante de l'évolution des mœurs et des vicissitudes politiques en .